j'étais attirée vers la fonte. La fonte, quand elle coulait, c'était beau à voir, on avait des lunettes de soleil. C’était beau à voir, ah oui ça, c'est un truc qui me manque un peu sur ça, sur la fonte. C'est joli, c'est liquide, c'est jaune c'est ...et encore à l'acier, elle est pas jaune, elle est blanche, c'est joli mais j’ai pas travaillé à l’acier. J'ai pas travaillé à l'acier mais par contre elle était plus jolie mais elle faisait plus mal aux yeux, à l’acier. à l’acier il fallait les lunettes automatiquement, on pouvait regarder nous de loin la fonte ça allait mais de près il fallait les lunettes. C'était des lunettes de soleil mais pas de soleil de Optic 2000!
le bon geste c'est quand on prend du poids, se baisser comme il faut, voilà mais des fois on a pas le temps, c'est une chaine et puis c'est la fonte qui nous commande, c'est la température, c'est tout à la température, trop chaude ça va pas, trop froide ça va pas voilà c'est ca. Donc des fois, on n'avait pas le temps, il y a plein de choses qu'on fait et qu'on devrait pas faire pour le corps, se baisser à ramasser quelque chose, travailler sans masque quand y a du wespray, travailler sans lunettes ça fait partie de la sécurité mais la sécurité... comme à la grenailleuse si on avait pas les lunettes que, des fois il y avait des petits éclats, ça faisait mal, des petites billes en ferraille là! ah ouais!
le bon geste c'est quand on prend le temps un petit peu de respecter l'outil, enfin la machine ou la pièce que l'on veut faire. Si on y va trop fort, on se fait mal, ou on abîme ou on est pas précis. C'est une alchimie entre la force et -je sais pas moi comment on peut dire ça - et la douceur du travail.
Je crois que malgré les règles qui disent que quand on enlève la blouse, on enlève le métier, on rentre chez soi.
Je trouve que c'est un peu utopique et c'est dur de faire la part des choses, même si on met de la distance, même si...
On ramène toujours un peu de vécu à la maison et on y repense... et ça travaille et on est des êtres humains donc on peut pas faire cette différence.
Je trouve que c'est ça c'est ce qui caractérise aussi et je pense que c'est pour ça qu'il y a beaucoup de gens qui sont...
on parle beaucoup de burn-out dans la profession parce que finalement on engrange plein de choses, on est un peu une éponge toute la journée (...)
il fallait veiller en permanence. Quand on coulait la fonte, il fallait à mesure qu'on vidait, réavancer doucement le pont parce que quand la poche était pleine, ça coulait loin mais à mesure qu'on vidait le truc ça coulait plus droit donc il fallait s’avancer en même temps que l'on coulait et ça c'est vrai que c'était ...il fallait être attentif, il fallait faire attention de pas....après on le faisait automatiquement, c'est sûr, parce qu'on avait pris notre point de repère mais c'est vrai qu'au début ça fait un peu peur, parce qu'on se dit bon si on fait couler à côté, ça va gicler, ça va envoyer, ça peut brûler les gens...
le rémouleur c'était des gestes de ...ben déjà visuellement, il fallait, il fallait être attentif, ne pas laisser de résidus dans les coquilles et puis bon il y avait un savoir faire aussi passer le souffle dans la coquille et puis revenir lentement ou inversement ou alors passer la brosse pour nettoyer c’était des gestes précis qu'il fallait avoir sous peine de... la sanction c'était immédiat quand on brossait dans un porte coquille en rotation ça fait 900 tours pratiquement le truc là. Introduire une brosse à l’intérieur, tenu manuellement, en appui,à la moindre fausse manip, euhhh ça part dans tous les sens. Donc tu peux te casser le bras, tu peux ...voilà donc c'était très précis, une gestuelle très précise, pas violente mais ... ouais c'est compliqué à exprimer.
oulalala, je ne sais pas combien de kilomètres nous faisons,
il faudrait mettre un... vous savez ce qui mesure le kilométrage, c'est énorme!
Moi je fais l'avenue d'Eysses, donc, jusqu'au boulevard de l'hôpital, jusqu'au feu rouge,
la rue Victor Delberge, Palissy... qu'est-ce que j'ai encore à faire? La rue pasteur, l'avenue de la Myre et Mory
jusqu'à la rue du château d'eau...rue du château d'eau... voilà en gros
Et tout ça il faut le faire jusqu'à 9h du matin, en commençant à 6h.
(...) Je suis brasseuse, voilà je fais de la bière. C'est un métier qui était porté par les femmes depuis des milliers et milliers d'années et aujourd’hui il y a un renouveau dans la brasserie française, de reprendre un peu ce pouvoir qu'avait les femmes de brasser. Quelque chose qui nous avait été enlevé mais bon ça c'est une autre histoire. D'abord c'est très technique, il faut apprendre les différents ingrédients du brassage, c'est à la fois technique, scientifique puisqu'il y a des paramètres à connaître, c'est physique aussi puisqu’on soulève des sacs de 25 kilos et des cartons de bières qui font entre 7 et 9 kilos. Après ce sont des gestes qui se transmettent, une fois que l'on a appris à brasser, je pense que l'on sait brasser.
Ben je pense que c'est comme pour tout apprentissage
- C'est un automatisme après...
- Voilà au début c'est des choses que l'on calcule et puis après ...
- ...après soit on fait, soit on oublie! soit on fait automatiquement soit on oublie...
- Si ça a était bien... bien appris enfin je dirais finalement bien compris
- Ouais c'est ça
- Parce qu'en fait, il n'y a pas de bien appris si ce n'est pas bien compris
- ça c'est sur
- Exactement, tu peux apprendre un geste, si tu ne comprends pas pourquoi tu le fais, tu finiras pas l'abandonner!
- Ouais on l'abandonne
Là, il n' y a pas d'école. Ce sont des métiers tellement spécifiques, y a peut-être...des aciéries, comme ça, y en a peut-être, je sais pas moi, en tout et pour tout une cinquantaine dans le monde donc vous apprenez pas à l'école, vous apprenez sur le tas. Il existait l’école des apprentis à l'usine qui formait, en général, les métiers classiques: électriciens, dessinateurs mécanos, les trucs comme ça, mais souvent c'est gens là ils rentraient à l'usine, certains allaient dans ces métiers là et d'autres partaient en production - comme moi d'ailleurs- sur des métiers comme ça de fonderie où y a pas forcément d’école, tout simplement. Mais après pour le travail lui même, vous arrivez, vous allez avec l'ancien et puis voilà : tu fais comme ça sinon tu prends une baffe (...)
C'est - bon, bien sûr - le stress des examens ça c'est normal... mais c'est quand même un métier où l'on est en contact avec des gens, où l'on a des responsabilités énormes... où il y a une quantité de connaissances incroyables à connaitre, qui je pense en trois ans... c'est pas du tout suffisant parce qu'en fait, comme je disais tout à l'heure,
on aborde plein de choses, c'est sûr, on voit de tout, alors on nous répète ''mais ça vous l'avez vu en première année, vous l'avez vu..."
mais en fait on le voit tellement rapidement qu'on a pas le temps d'assimiler, c'est pas des choses que l'on acquiert si on ne les voit pas en stage... c'est pas quelque chose que l'on va pas acquérir, en fait.
Les entrailles c'est dedans c'est là. Même encore là, on en parle ... pendant 2 ou 3 nuits ça va me travailler. Même les photos, j'ai des photos, des fois avec la famille on les regarde... tout ça ....ça revient. Celui qui s'en va, qui arrive à la retraite, qui s'en va que l'usine continue, que ça fonctionne - plus ou moins bien parce que bon dans les conditions que c'était- je pense que ça doit faire autre chose. Mais partir comme ça : être mis dehors parce que c'est vraiment être mis dehors! Tu es sur le poste de travail, il est 9h30 du matin, on vous dit : ''vous arrêtez tout, prenez vos affaires, rentrez chez vous'' c'est ... quand vous avez passé 36 ans dans la boîte ça fait quelque chose, ça fait quelque chose. C'est pour ça que c'est dommage parce que bon c'est surtout... le savoir-faire.
à l'école on apprend la théorie, donc on a plus de temps pour justement voir les gestes, comment il faut faire et tout.
Mais sur le terrain...on apprend plus parce que c'est jamais la même chose en fait
Tout ce que l'on appris à l'école, la théorie, ça s'applique différemment selon le chantier en fait.
Par exemple quand vous faites un enduit il y a quelque chose qui ça s'appelle le gobetis.
C'est la première couche qu'on met à l'enduit. On prend le mortier sur la truelle et on fait un fouetté, en fait, on jette, on projette le mortier.
C'est traditionnel, c'est à la main. Maintenant on le fait à la machine, des grosses machines, mais traditionnel à la main c'est comme ça.