— A PROPOS DE LA CREATION DE CETTE ENCYCLOPEDIE par Sylvie Balestra, chorégraphe
Pourquoi cette encyclopédie du geste au travail ?
Cette encyclopédie rend compte de 10 années d’observation. Je suis chorégraphe et j’associe danse et anthropologie, avec la compagnie SYLEX qui porte mes recherches et créations depuis 2010. Je fais un travail de terrain: je vais à la rencontre de communautés, c’est-à-dire des groupes de personnes qui ont un commun social. Le travail est souvent l’objet de mes recherches et de commandes artistiques. Concrètement je passe du temps avec des personnes, je mène des entretiens, je les enregistre ou les filme. Ces éléments d’observations, d’enquêtes, je les utilise pour créer des spectacles, c’est la matière première pour mes créations. Autour de mes œuvres chorégraphiques, j’aime provoquer des rencontres: j’utilise certaines vidéos ou entretiens pour échanger avec les communautés que j’observe. Pendant mes recherches, cela me permet de trouver un langage commun et aussi de partager avec d’autres personnes extérieures à ces groupes. C’est grâce à ces moments là que je me suis rendue compte de l’intérêt des personnes pour cette matière première qui a plutôt avoir avec du documentaire. Beaucoup de personnes travaillent mais on ne sait pas ce qu’elles font, ni comment elles le font. J’y suis sensible parce qu’en tant qu’artiste j’en fait l’expérience tout le temps. Nous avons des à priori et des idées reçues sur tel et tel travail alors que nous ne savons pas comment cela se passe. Cette encyclopédie révèle ce qui est invisible: à la fois la partie immergée de mes spectacles, ce qui les nourrit, et le quotidien de travailleurs et travailleuses. Cette encyclopédie est l’occasion de prolonger les rencontres et comme souvent dans mes créations, de donner la parole directement aux personnes via des entretiens, des vidéos. Alors qu’elles sont les premières expertes de leur travail avec leur savoir- faire, elles ont rarement l’occasion de parler de ce qu’elles font et ressentent. Dans cette encyclopédie, il y a à la fois des témoignages de personnes qui ont travaillé toute leur vie dans une usine et des élèves en apprentissage qui, s’ils et elles n’ont pas encore l’expérience du travail, ont une réflexion sur le métier qui n’a pas encore subi la cadence et les exigences du travail, la réflexivité est possible. J’aime échanger et créer avec eux en traversant les gestes et le vocabulaire de leur « futur » métier.